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.Je n’en ai pas encore fini avec lui.Une fois que j’ai démarré le moteur, je lui crie :— Qu’est-ce que tu sais de Walhalla ?— C’est le palais d’Odin, dans la mythologie.— Odin ? demande Issie.— Un dieu nordique.Je sors du parking.— Alors, il n’existe pas vraiment.68CAPTIVE— Bien sûr que non ! s’exclame mon père, méprisant.J’aimerais que tu révises ton opinion sur moi, Zara, et que tu me libères.Je t’assure…— Et les walkyries ?Je m’arrête à l’un des deux feux rouges du village.M.Burns, un des professeurs, s’arrête à côté de moi et me fait un signe.Issie et moi, on plaque un sourire sur nos visages et on lui rend son salut.— Les walkyries ? Des sornettes…Cette fois, il éclate de rire.Issie me regarde avec de gros yeux, mais je mets un doigt devant ma bouche pour lui faire signe de ne rien dire.Le feu passe au vert.— Je me demande pourquoi on s’embête avec lui, dis-je à Issie.Elle allume la radio.— Et moi, donc !Lorsqu’on le dépose, il essaie de s’échapper.Je suis obligée de le maîtriser et de le ramener à l’intérieur du périmètre d’acier.Cela me vaut l’admiration d’Issie, qui me dit que je suis au point pour le Super Bowl !Une fois dans la voiture, nous filons aussi vite que possible.Devant chez Issie, je passe la marche arrière, le pied toujours sur le frein, prête à partir.J’attends des consignes, je suppose.— Je ne suis pas certaine de le croire à cent pour cent, mais je suis très inquiète pour Nick.J’ai peur de ne pas pouvoir assurer sa sécurité.Issie penche la tête.— Zara, ma chérie, cela ne dépend pas seulement de toi.Nous sommes tous concernés.Tu n’es pas seule.— Ouais.Je sais que je peux compter sur vous, mais j’ai quand même l’impression que tout repose sur mes 69CArrIE JonEsépaules, que c’est ma faute, ou que ce sera grâce à moi.— T’es pire que Nick ! dit-elle en souriant pour atté-nuer la dureté de ses mots.Tu ne portes pas le monde entier sur tes épaules, Zara White.L’air glacial s’engouffre par la porte du passager.— Tu me le jures ?Issie sort et prend la poignée pour pouvoir refermer.— Je te le jure.Je me demande si les promesses de ce genre ont une quelconque valeur.Une fois Issie chez elle, je regarde mes messages et appelle ma mère tout en conduisant.Elle est toujours à Charleston, mais elle va venir s’installer ici.Elle a déjà démissionné, mais lorsqu’on est PDG on doit donner un préavis avant de pouvoir partir.Sans cela, la société peut imposer des « pénalités financières » ou vous intenter un procès.Quand je repense à ce que mon père m’a dit, je suis contente qu’elle soit encore là-bas.Mais ses baisers me manquent, ses beaux tailleurs me manquent, son odeur me manque.Le téléphone sonne et je tombe sur sa boîte vocale.Elle est sans doute en réunion pour embaucher un médecin ou un truc aussi chiant.Je tapote un message et coupe le téléphone.Je me dis que tout ira bien.Ce n’est pas facile de conduire, alors, je ne devrais pas m’amuser avec mon téléphone.Pauvre Yoko ! Ses pneus essaient désespé-rément de s’accrocher à la route verglacée.J’essaie de braquer pour ne pas aller me planter dans l’une des congères qui me guettent au bord de la route.En fait, il suffit d’essayer.C’est tout ce qu’on peut faire dans la vie : essayer de survivre au lycée, essayer de conduire sur les routes piégeuses, essayer…70CAPTIVEDevyn cite toujours Yoda d’une voix de stentor et déclame des trucs qui sont censés être la philosophie du bon côté de la force.Pour moi, ce type, c’est une sorte de moine tibétain, mélangé à une espèce de nigaud qui continue à traîner ses basques au 7-Eleven à près de trente ans.Et avec une tronche de chat vert, pour compléter le tableau ! Dans Star Wars, Yoda dit : « Fais ou ne le fais pas, il n’y a pas d’essai.»C’est nul ! Parfois on ne peut pas simplement faire.La seule chose dont on est capable, c’est d’essayer.J’allume la radio.Bono chante sur la perte, le besoin et l’espoir.C’est un vieux U2, pas un de leurs nouveaux titres.D’un côté de la route, des ombres bougent dans le bois.Elles ressemblent à des gens.Je me fais des idées, non ?Oui, bien sûr que oui.La brume hivernale s’insinue entre les arbres et voile de son linceul… tout ce qui pourrait se cacher au bord de la route.Tout est gris… dangereux.Je monte le son de la radio à plus de cent décibels, ce qui m’assure d’être à moitié sourde avant l’âge de vingt-cinq ans, et je déclare :— Je me fiche complètement de toi, brouillard !J’ai l’impression que des milliers d’araignées grouillent sous ma peau et esquissent un pas de danse celtique.C’est peut-être parce que je suis restée trop longtemps avec mon père ou parce qu’on ne l’a pas bien enfermé.Peut-être a-t-il réussi à s’échapper.— Merde !J’ouvre mon téléphone et appuie sur le raccourci numéro deux.Le téléphone sonne et sonne dans le vide.— Issie ?71CArrIE JonEs— Zara ?Elle parle d’une voix étouffée ; je me demande bien pourquoi.On a l’impression qu’elle a pleuré.— Ça va ?— Oui, oui.— Tu es sûre ?— Ouais, super… Pinoc…Je coince le téléphone entre mon épaule et ma tête pour garder les deux mains sur le volant.— La sensation est revenue.— Les araignées ?— Oui.Continue à conduire.Va de l’avant.Bouge.— Le roi des lutins est tout près de toi, c’est pour ça ?— Oui.— Oh, oh…Elle marmonne quelques mots loin du téléphone et ajoute :— La sensation est revenue…— Cela t’ennuierait si je te demandais de venir ?— J’arrive.— Devyn est avec moi.— Préviens Nick tout de suite !Je ferme le téléphone et réfléchis un instant.Je ne voudrais pas mettre Nick en danger.J’allume de nouveau la radio et prends le virage.La courbe n’est pas terminée lorsque j’écrase la pédale de frein.Un jeune blondinet se tient au milieu de la route.Il attend.Pourvu que ce ne soit pas moi qu’il attende !à propos des lutinsÊtre guidé par les lutins : être perdu, désemparé, désorienté.Yoko dérape, je perds le contrôle du véhicule.Yoko part sur la gauche, puis sur la droite et fonce en plein dans un arbre.Le tronc massif est bien plus solide que ma voiture.Et si je rentre dedans ? Ça ne va pas faire du bien, c’est sûr : la voiture va être réduite en bouillie ! Je ne pourrai pas l’éviter…— Noooon !Je hurle, mais n’entends aucun son.J’appuie sur le frein.Les freins hurlent, eux aussi.« Nick ! » Je crie son nom sans même y penser.Yoko heurte un objet gigantesque et solide.L’arbre ? Je ne sais pas.Ma tête oscille d’avant en arrière et d’arrière en avant.L’airbag s’est écrasé contre mon visage et ma poitrine.Je ne vois rien.Je ne peux pas respirer.Le monde n’est plus qu’une masse de plastique et de douleur.Les fils électriques brûlent.Une odeur acide m’emplit les narines.Je repousse l’airbag et j’ai mal à la poitrine.73CArrIE JonEs— Sors de là ! Sors de là ! crie une voix mâle.La portière s’ouvre.L’air glacial s’engouffre.L’odeur est plus de plus en plus insupportable.Ça brûle toujours ! Des mains me saisissent.Je hurle en me débattant.— Nick ?— J’essaie de t’aider, dit un homme.Ce n’est pas Nick, bien entendu.Non, ce n’est pas Nick.Ressaisis-toi ! Ressaisis-toi ! J’essaie d’inspirer profondément.— Je ne peux pas bouger
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